Tribune : pour une écologie politique, pas politicienne

Des bruissements de l’actualité récente peuvent être tirés deux faits et dits qui rappellent le caractère éminemment politique de l’écologie. Le premier est cet échange entre Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, et Mme Svetlana LOUIS ( Représentante d’Ecologie sans Frontière et du collectif de PME « Touche pas à mon panneau ») dans le cadre de la table ronde organisée par la première sur l’efficacité énergétique.

SL : « Je suis très étonnée qu’il n’y ait pas plus d’incitation à utiliser du matériel fonctionnant avec des énergies renouvelables. Je comprends l’objet de la table ronde comme étant de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de diminuer la dépendance de la France aux énergies fossiles, qui ne sont pas présentes en France. Pourquoi n’incite-t-on pas plus les familles à utiliser le chauffage au bois par exemple, pour ne pas parler par exemple des centrales photovoltaïques, de l’autoconsommation et de toute la filière photovoltaïque, qui a été totalement lancée et totalement massacrée en France? »
NKM : « Je n’ai pas l’intention de perdre ce qu’il reste de temps de la réunion à engager un débat politique avec les uns ou les autres. Je ne rentre même pas là-dedans, la question est l’efficacité énergétique, ce n’est pas les moyens de production de l’énergie. Il y a un problème d’efficacité énergétique sur le chauffage électrique et il peut être pris en compte, mais certainement pas les moyens de production de l’énergie. Cela ferait un débat très long et absolument sans intérêt, à mon avis, dans cette configuration. »

Il faut d’abord se réjouir du fait que ce genre de travail existe; et toutefois espérer que le fruit en sera plus beau que ce qui a résulté de la consultation faite dans le cadre du Grenelle de l’environnement. La réserve émise ici par la ministre explique sans doute ce bilan très décevant. Car la limite est là : plutôt que revoir de façon globale la question énergétique sur le principe d’énergies plus propres et renouvelables, il s’agit d’aménager une situation sans remettre fondamentalement en cause les grands équilibres actuels, qui traduisent des intérêts autres qu’écologiques. L’écologie politique, c’est cela : c’est poser comme primordiale la question du rapport de l’humanité avec son environnement, de leurs échanges et non plus de l’exploitation du second par la première – et il en va de même, au sein de l’humanité elle-même. L’écologie politique ne saurait donc être une branche d’un parti « généraliste ».

Le deuxième fait est la formidable initiative de Pierre Rabbih et des Colibris : tous candidats pour 2012. L’intention est, comme il est dit, de « se compter » pour :
– donner consistance aux attentes;
– constituer, par le nombre, l’évidence d’un seuil critique important d’individus prêts à s’engager dans une démarche collective.
Ce n’est donc pas miser sur l’individu mais sur une prise de conscience et de responsabilité collective de la nécessité d’une conversion globale de notre société sur la base de l’écologie politique.

L’initiative part sans doute aussi de la difficulté pour l’écologie politique de s’incarner dans le paysage politique, malgré les beaux scores récents d’Europe écologie – Les Verts. C’est prendre le contre-pied de l’hyperpersonnalisation de la Présidentielle de façon ingénieuse, en renvoyant aux attentes que toutes les études démontrent en la matière. Faire nombre pour proposer idées et actions, et non plus pour rechercher les postes de pouvoir : bref, militer pour une écologie politique, et non plus politicienne. Telle est l’ambition risquée d’une autre candidature, celle d’Eva Joly, que justifient pleinement l’approche restrictive de Nathalie Kosciusko-Morizet aussi bien que les réticences de François Hollande.

SK