J’y suis j’y reste d’EVA JOLY !
Ce texte n’est pas une justification. Pas même une mise au point.
C’est le sens de mon action depuis que j’ai contribué, avec d’autres, à sa fondation.
Pascal Durand ne disait pas autre chose en prenant ses fonctions de secrétaire national.
A en croire ce que disent nombre de membres ou de sympathisantes et sympathisants, notre mouvement ne va pas bien.
Il est aujourd’hui faible en adhérent, et je crains qu’il ne soit demain, faible en influence, si la sclérose l’emporte sur l’envie de faire mouvement.
C’est à cette aune, qu’il faut comprendre mon action politique récente. Je refuse que notre mouvement se normalise et se dissolve dans la participation gouvernementale.
Nous ne devons pas renoncer à marcher sur nos deux jambes : l’écologie est une force de proposition qui s’appuie sur un esprit de résistance. C’est cette double identité que j’entends faire vivre.
Ces dernières semaines, ma prise de position en faveur de la participation à la manifestation du 5 mai a fait débat. J’ai même vu avec étonnement surgir la menace d’ouvrir le débat sur ma campagne présidentielle.
Cet échec a plusieurs causes.
Mon équation personnelle ne faisait peut être pas de moi la meilleure candidate.
Au contraire notre primaire est devenue une machine à perdre. Avec le recul, il me reste dans la bouche un gout de cendres, et la désagréable sensation que Nicolas Hulot et moi même avons été instrumentalisés pour des jeux internes. Bien sur, nombre de nos partisans respectifs étaient sincères et enthousiastes.
Mais les promoteurs de nos candidatures n’avaient pas tous en tête le bien de l’écologie politique,
Certains développaient bel et bien des stratégies visant uniquement à empêcher tel ou telle de nous représenter à la présidentielle. Une fois la primaire passée, ma victoire surprise ayant troublé le jeu, la campagne n’était manifestement plus la priorité.
En faisant campagne ensemble, nous aurions été dans la continuité de la dynamique des élections européennes et des régionales
J’y ai ma part de responsabilité, mais ne laisserait personne dire que j’en suis seule responsable.
Mais les mauvais coups sont eux aussi venus de partout. C’est une question de culture : nous ne savons pas nous mettre autour d’une table pour déterminer ensemble ou est notre intérêt commun.
Les snipers n’ont pas seulement plombé ma campagne, ils ont manqué de respect à ces milliers de militants et sympathisants qui, eux, sur le terrain, se sont mobilisés sans compter, par conviction et par loyauté.
Aucune dynamique n’est possible quand on devient le punching-ball de sa propre famille. Le récit de ma campagne n’a donc jamais été celui d’une candidature de conquête, mais bien celui d’un long calvaire ou une seule question était posée : « va t’elle tenir ?»
J’ai tenu, mais cette campagne s’est vite avérée être une mission impossible.
Je ne tire aucune amertume du choix qui a été fait : il nous a permis d’avoir un groupe à l’assemblée et deux ministres. Je crois que l’écologie politique s’en trouve renforcée dans les institutions.
Mais reconnaissons quand même que notre image de force politique différente a été écornée et que nous sommes affaiblis dans la société pour quelques temps.
C’est ce point qui m’agite. Comment renouer avec la société ? Quand la colère et la déception monte dans le pays, il me semble difficile de se tenir à l’écart de la protestation et de la demande d’un changement de cap.
Pourquoi ce que disent de plus en plus l’ensemble de nos dirigeants sur la politique conduite par l’actuel gouvernement ne pourrait être porté sur la place publique ?
Je crois à la complémentarité des discours.
Nos ministres, se battent au gouvernement, pour faire exister dans le secteur qui leur a été confié, une approche écologiste, et pour avoir un bilan ministériel digne de ce nom à présenter. Nous devons donc les soutenir sans réserve.
Mais comment peuvent ils avoir des marges de manœuvre si nous mêmes, nous appliquons, ce que personne ne nous demande, la même discipline que celle à laquelle ils sont soumis ? Notre solidarité ne peut pas s’exercer par l’autocensure. Je pense au contraire qu’en parlant clairement, et en disant les positions qui sont les nôtres nous leur donnons l’occasion de témoigner de l’existence dans la société d’une demande d’une politique plus conforme à nos aspirations.
Sur Notre Dame des landes par exemple, c’est bien la dialectique entre un mouvement social radical et une présence d’écologistes dans les institutions de la République qui permet de continuer à bloquer ce funeste projet.
La plupart sont d’ailleurs les mêmes qui relaient avec gourmandise les rumeurs sur mon prétendu départ sur une liste front de gauche.
La manœuvre est simple : me discréditer aux yeux des militantes et des militants pour dénaturer le débat de fond que je veux ouvrir. On me dit même que certains ont déjà décidé de me le faire payer et de m’écarter pour les prochaines élections européennes si d’aventure je décidais de me représenter.
Les françaises et les français sont écœurés par leur classe politique.
La crise de confiance est à son paroxysme.
Voilà pourquoi nous sommes sommés de répondre aux interrogations.
Nous devons dire si nous considérons que c’est un accident de parcours ou si c’est le fruit d’un système.
Il se trouve que depuis 20 ans je dis que c’est un système d’irresponsabilité et de soumission au pouvoir de l’argent qu’il faut combattre.
Mélenchon a parlé de coup de balai, choquant les oreilles sensibles ? La belle affaire !
La vérité, c’est qu’il est en deçà de la réalité : un Karcher ne suffirait pas à décrasser le système actuel. Il faut un changement radical.
Voilà ce que veut dire pour moi la sixième république.
C’est sur cette base que j’ai un temps discuté avec François Bayrou, ce qu’on me reproche aujourd’hui, en disant « elle passe de Bayrou à Mélenchon. » C’est faux.
Avec constance je plaide depuis longtemps pour la République exemplaire.
C’est un combat fondateur de mon engagement en politique.
Mais ces dernières années, au passage, mes yeux se sont ouverts sur la question sociale, sur l’idiotie des politiques d’austérité, sur les manques cruels de la construction européenne.
Mon parcours a enrichi ma vision du monde et des moyens de le transformer. Je suis devenue une militante écologiste qui se bat pour faire émerger une autre voie au sein des forces progressistes.
Ne pas laisser le monopole de la rue au Front de Gauche, c’était pour moi ne pas leur abandonner le terrain de la critique démocratique et sociale.
On a juste brandi des arguments disciplinaires dont j’aurais aimé qu’on les utilise à l’égard de la noble cohorte des tireurs dans le dos, pour calmer les attaques fratricides pendant ma campagne Indiscipline ?
On ne trouvera aucune déclaration publique de ma part attaquant l’un ou l’autre de nos responsables. J’aurais aimé que la réciproque soit vraie.
J’ai seulement entendu notre secrétaire national esquisser la possibilité d’un bloc majoritaire allant du modem au front de gauche dans une interview au JDD.
Il faut donc choisir.
Alors disons les choses clairement : je plaide pour une majorité rouge rose verte ouverte à la société civile, pour bâtir une coalition de l’arc en ciel.
A l’heure où François hollande parle de remaniement, nous devrions adosser notre demande de changement de cap à une demande de rééquilibrage gouvernemental.
Cécile Duflot, qui a fait ses preuves comme excellente ministre doit monter en grade et en influence pour renforcer le poids des écologistes, la coalition doit s’élargir au front de gauche pour répondre à la demande sociale, des ministres de la société civile doivent permettre au gouvernement de retrouver le chemin du peuple en intégrant des luttes symboliques de la société mobilisée et du changement.
Voila la ligne que je pense être juste.
Elle ne me conduit pas à intégrer le Front de gauche, mais à dialoguer avec lui.
Nous avons en effet des divergences profondes avec les communistes comme avec le Parti de Gauche. Mais si nous sommes capables de gouverner avec les socialistes, nous devons au moins être capable de déterminer des luttes communes avec le Front de gauche, et au delà avec la société civile, pour peser sur les politiques menées.
La soumission à l’agenda politique du P.S ne peut pas être une ligne de conduite.
Ce débat ne fait que commencer.
Je prendrai mes responsabilités, notamment en soutenant une motion lors du congrès à venir.
L’enjeu de ce congrès ne peut pas être de monter une opération anti-Durand ou anti-Duflot : nous devons par contre avoir un vrai débat politique sur la stratégie à mener pour retrouver la société.
Parce que l’avenir de notre mouvement est déterminant pour l’avenir de notre pays.
J’ai peu d’ambition pour moi, beaucoup pour nous et plus encore pour les jeunes générations de l’écologie qui doivent prendre la relève.